Vergers Paul Jodoin : Tradition familiale
Les Vergers Paul Jodoin se distinguent par la diversité et la très grande qualité de leurs produits. Qui n’a pas succombé aux jus frais vendus sous la marque Tradition ? Portrait d’une entreprise familiale qui, au rythme des années, n’a cessé de grandir tout en conservant les valeurs qui ont fait sa réputation.

Si Rougemont est universellement connu pour ses vergers et ses cidres, il ne faudrait pas oublier que le jus de pomme est depuis toujours l’ambassadeur de la région dans nos frigos. Bien avant les jus exotiques que l’on retrouve aujourd’hui un peu partout, le jus de pomme régnait en roi et maître dans nos chaumières. Il a d’ailleurs toujours une place de choix dans le coeur des Québécois.
Mais la famille Jodoin avait compris que les Québécois désiraient avoir dans leur verre un jus bien à eux, différents, dotés d’un goût franc. Leurs jus se distinguent de tous les autres, comme leurs pommes. Et cette quête d’excellence fait que chaque année ou presque, de nouveaux cultivars font leur apparition dans les immenses vergers de la famille Jodoin.
Il était une fois…
Ce n’est pas d’hier que la famille Jodoin est tombée dans les pommes. Déjà, au début du XXe siècle, l’ancêtre Jean-Baptiste et sa conjointe faisaient ensemble la production de pommes à partir d’un verger acheté dans la Petite-Caroline, à Rougemont.
Comme c’était le cas dans nombre de famille du temps, très souvent les enfants reprenaient l’entreprise familiale ou recevaient un coup de pouce afin de démarrer leur propre entreprise. C’est ainsi, qu’avec l’aide de son père, Ernest Jodoin reprît le verger familial.
On ne s’étonnera pas d’apprendre que des 13 enfants qu’il eut avec sa femme Alice, plusieurs tombèrent eux aussi dans les pommes. Dont Paul qui reçut de son père un coup de main afin d’acquérir une maison et une terre dans le rang du Cordon à Saint-Jean-Baptiste. C’est à cet endroit, dans les années 1960, qu’est née l’entreprise Les Vergers Paul Jodoin.
Temps durs
Mais les premiers temps furent difficiles. Outre les pommes, monsieur Jodoin gérait la culture de pommes de terre et de petits fruits avec des succès, disons-le, mitigés. Il a fallu près de 8 années avant que l’entreprise roule rondement, avec à la clé, cet amour des vergers et des pommes.
S’en suivirent des années d’innovation alors que l’entreprise fit l’acquisition de ses premiers entrepôts de réfrigération à atmosphère contrôlée, ce qui permettait de conserver la récolte beaucoup plus longtemps et d’en assurer une distribution optimale. Ce procédé innovateur, qu’il offrait à d’autres entrepreneurs pomiculteurs de la région, permettait enfin d’offrir aux Québécois des produits locaux durant presque tout l’hiver. Il faut savoir qu’un autre membre de la famille Jodoin avait démarré son entreprise d’emballage de pommes qu’il distribuait dans plusieurs régions, dont celle de la Capitale-Nationale.
Mais après six années, l’entreprise d’emballage connut des ratés et monsieur Paul Jodoin racheta la « business » et la relança à son compte.
L’union fait la force
L’agroalimentaire est un milieu stimulant, soit, mais il arrive régulièrement que pour de nombreuses raisons, l’entreprise connaisse des hauts, mais aussi des bas. Et au début des années 1980, tout ne tournait pas rond aux vergers Paul Jodoin. Les trois fils de Paul Jodoin, Pierre, Sylvain et François, qui déjà œuvraient au sein de la société, ont racheté, à l’automne 1986, la totalité de l’entreprise afin d’offrir une heureuse retraite à leur père.

En s’unissant ainsi, les trois frères Jodoin firent du proverbe « l’union fait la force » leur devise. Pour François, le bonheur est dans le verger et la production n’avait déjà plus de secret plus lui. Du côté de Sylvain, c’était la mécanique et l’entretien de la machinerie qui plus que tout, le rendait heureux. Quant à Pierre, ses responsabilités s’étendirent à la gestion de l’emballage, les achats et la mise en marché des pommes et des jus par la suite.
Dans le jus
Après quelques années à travailler ensemble, les trois frères lancèrent en 1992 leur première usine de transformation de jus. En effet, plusieurs grandes entreprises du milieu de l’alimentation se disaient intéressées par un produit frais, provenant des vergers Jodoin. Mais beaucoup d’équipements étaient nécessaire pour faire un bon test de marché.
Premier client : le géant Costco. Après quelques essais concluants dans un magasin, il fut demandé aux vergers Jodoin de distribuer leurs jus dans l’ensemble des points de vente de Costco. Un succès. D’autant plus que leur jus était brut alors que traditionnellement, le jus de pomme vendu en magasin était filtré et clair.
De fil en aiguille, Pierre Jodoin, en charge des ventes, continua de développer de nouveaux points de vente dans plusieurs autres chaînes et boutiques d’alimentation. Le jus brut allait devenir le « brand » des jus Tradition, celui par lequel la société se démarquait de ses concurrents.
On s’en doute, après quelques années à connaître du succès, les vergers Paul Jodoin investirent dans leurs premiers pressoirs. Et commencèrent à diversifier leurs produits. Deuxième jus à être offert, la limonade, un produit qui s’avérera être un nouveau succès populaire.

On agrandit
Qui dit succès dit agrandissement et acquisition de nouveaux actifs pour l’entreprise. « En quelques années, nous avons fait l’achat de 8 nouveaux vergers » qu’il a fallu, la plupart du temps, revamper, histoire de leur insuffler une nouvelle vie et les rendre productifs à nouveau. Bref, on arrache les arbres et on replante avec de la nouveauté.
Quant aux infrastructures, à 7 reprises, depuis 1986, il a fallu agrandir les bâtiments et acheter une multitude d’équipements afin de les rendre conformes aux plans de développement et supporter la croissance de la société.

Et on fait des acquisitions
Tout ce temps, Pierre et ses frères ont des visées sur le marché canadien et surtout, le marché américain. Mais n’y entre pas qui veut. Ce sont les achats de quelques marques comme Bennett’s et Moût de Pom qui ont facilité les choses et qui ont propulsé les vergers Jodoin dans le monde de l’épicerie. Le développement avec les chaînes américaines se font principalement avec « de la marque privée » .
« Le temps file »
Le poids des années se fait sentir au sens de l’entreprise. Les trois frères prennent de l’âge, quoique toujours actifs, et regardent du côté de la relève. Alors que bien des entrepreneurs déplorent le peu de relève familiale, les enfants des trois frères eux, œuvrent au sein de l’entreprise. Ils forment une relève intéressée et impliquée; un gage d’une d’une belle transition générationelle.
Mais le plus difficile est de laisser-aller. Ces jeunes ont leurs propres idées pour le futur de l’entreprise. Et les trois frères en sont conscients. « Ils n’ont pas d’autre choix que de faire évoluer la société ».
Et la pomme, elle ?
Il faut en être conscient, la culture de la pomme est appelée à changer au cours des prochaines années. Avec les dérèglements climatiques, certains cultivars fort connus telles la Mc Intosh ou la Spartan sont appelés à connaître un succès moindre tandis que de nouvelles espèces s’imposeront sur les marchés de la consommation et de la transformation.
Aux vergers Paul Jodoin, ces changements ont débuté il y a déjà plus de 15 années de cela. « Ça ne date pas d’hier que des choix ont dû être faits. Le status quo au niveau de la productivité et de l’offre variétale n’était plus une option puisqu’il faut toujours garder en tête notre but de bien répondre à la demande de volume des chaînes d’alimentation et des goûts des consommateurs. »
L’entreprise a rejoint ce que l’on appelle «les clubs de production», qui ont développé différentes variétés de nouvelles pommes très tendances qui s’implantent actuellement en Amérique du Nord et qui se développent et se développeront encore davantage dans le futur au Québec.
La croissance des années futures, selon les trois frères, passera inévitablement par cette nouvelle approche.
Bref, on comprendra que la pomme a encore un bel avenir devant elle. Tout comme l’entreprise Paul Jodoin.
